Si ces analyses semblent encore pertinentes, c’est parce que le capitalisme des plateformes a abondamment recours à la même vieille ruse qu’utilisaient les propriétaires manufacturiers du siècle passé: évacuer les variables sociales d’un processus d’innovation technologique pour le faire apparaître comme une phase nécessaire d’un progrès indéfini. Le tout pour dissimuler les tensions et les résistances que les travailleurs, les “humains”, introduisent dans les agencements productifs, au fil de leur revendications et aspirations. Le discours technologique qui accompagne l’émergence des intelligences artificielles peut alors être lu comme une formule contingente visant à inhibiter l’organisation des travailleurs et à réduire leur pouvoir de négociation. Les robots ne sont dans cette opération que les avatars commodes de la volonté des propriétaires des plateformes d’enrayer la constitution d’un mouvement d’opposition.

antonio a. casilli